Le fondateur / La fondatrice

Comment détenir ses actions dans sa start-up ?

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Cet article a été actualisé en Mars 2024 pour prendre en compte les nouveautés de la loi de finances.

C’est une question que tout le monde s’est posée à un moment dans sa vie d’entrepreneur : Quel est le meilleur schéma de détention pour les titres de ma société, en direct, via une holding ou encore un Plan d’Epargne en Actions ?

Après avoir interrogé un certain nombre de fondateurs Galion, nous nous sommes rendu compte que ce choix n’avait rien d’évident. En fait, environ la moitié avait opté pour garder tous leurs titres en direct, tandis que l’autre moitié en avait logé tout ou partie dans une holding personnelle.

Bref, c’était l’occasion de faire un point sur une question qui peut avoir un impact important sur la taxation au moment de la vente de ses parts, ce à quoi tout entrepreneur est forcément (un peu) sensible.

Comme tout ce qui touche à la fiscalité, cela nécessite d’avoir une vision chiffrée d’autant plus précise que le cadre réglementaire a tendance à changer (trop) souvent. Pour s’assurer que nous avions les bons paramètres en main, nous nous sommes appuyés sur l’expertise de l’équipe d’ingénierie patrimoniale d’Edmond de Rothschild (France) qui suit au jour le jour l’évolution de la réglementation et de la doctrine de l’administration fiscale. Nous les remercions pour leur soutien sur cette étude.

Dans tout le document, on est parti du principe que l’entrepreneur est résident fiscal français.

1. LA FISCALITÉ SUR LES ACTIONS EN NOM PROPRE

Avant de s’intéresser au cas des holdings, faisons un rappel sur la fiscalité en cas de détention des actions en nom propre qui – malgré une certaine complexité – reste le cas le plus simple.

Depuis 2018 un régime de Flat Tax à 30% s’applique à l’ensemble des revenus du capital. Cela comprend bien entendu les plus-values mais aussi les dividendes ou les intérêts des obligations.

Ce taux de 30% se décompose de la façon suivante :

– 12.8% pour l’impôt sur le revenu

– 17.2% pour les prélèvements sociaux

Il est à noter que la CEHR ou « contribution exceptionnelle sur les hauts revenus » de 4% au-delà de 500K€ ou 1M€ (selon qu’on soit célibataire ou en couple), instaurée par le gouvernement Sarkozy, a été maintenue en l’état. On peut partir du principe qu’elle est durablement inscrite dans le paysage fiscal. 

Pour les entrepreneurs Galion qui espèrent une plus-value qui se compte en millions d’euros, la taxation attendue sera ainsi de 34% au total.

i. Un régime dérogatoire pour les PME de croissance.

Malgré l’instauration de cette Flat Tax, il subsiste, sur demande expresse du contribuable et pour les titres acquis avant 2018, un régime dérogatoire antérieur.

Pour rappel, le principe de la taxation instaurée en 2012 par la législature précédente reposait sur une taxation du capital sur la même base que les revenus du travail. C’est le combat mené par le mouvement des pigeons qui avait permis l’instauration d’abattements pour durée de détention.

Le recours à ce mode de taxation peut permettre de diminuer à 27.49% la taxation globale de la plus-value (avec l’application de la CSG déductible).

La définition de ce régime est très large et permet facilement à tous les entrepreneurs Galion d’y qualifier. Pour cela, au moment de l’acquisition, antérieure donc à 2018, des titres par le fondateur, la société doit respecter les critères suivants :

– avoir moins de 10 ans en cas d’acquisition ou de souscription,  

– ou être une création ex-nihilo et non une restructuration ou reprise d’activité existante

– avoir moins de 250 salariés et un total de bilan inférieur à 50M€ ou un chiffre d’affaire inférieur à 43M€

Bien entendu pour le créateur d’une entreprise ces conditions sont par définition respectées.

Il faut en plus pendant toute la vie de la société que celle-ci :

– n’accorde aucune garantie en capital aux actionnaires en contrepartie de leurs souscriptions

– qu’elle ait son siège dans l’Union Européenne

– qu’elle exerce une vraie activité commerciale

Avec le recul sur ce mécanisme, il est important de retracer l’historique des opérations sur le capital de la société pour s’assurer d’une continuité à l’éligibilité au régime.

ii. Un abattement sur la durée de détention des titres

En combinant le régime dérogatoire et 8 ans de détention (et force est de constater que les plus beaux succès de la French Tech ont pratiquement tous mis plus de 8 ans à arriver à maturité !), on bénéficie d’un abattement assez spectaculaire de 85%. Néanmoins, cet abattement ne s’applique que sur l’impôt sur le revenu et non les prélèvements sociaux et la contribution exceptionnelle, qui eux s’appliquent dans tous les cas sur l’assiette complète. C’est d’ailleurs une tendance assez générale que les prélèvements sociaux soient exclus des nombreuses niches fiscales qui font les délices des conseillers en patrimoine.

Au final, au bout de 8 ans de détention, on arrive ainsi à un taux marginal tout compris de 27,95%. On voit qu’on est très loin des 64,5% initiaux. A titre de comparaison, en Californie, paradis des entrepreneurs, la fiscalité sur les actions fondateurs est de 37%.

Enfin pour être complet, il faut mentionner que l’administration fiscale dans sa grande sagesse a rajouté une petite carotte supplémentaire en permettant de déduire du revenu imposable de l’année N+1, 6,8% de la CSG appliquée à la quote-part de plus-values effectivement taxée à l’impôt sur le revenu (soit 6,8% x (1-85%) x Plus-values). 

Prenons un exemple sur une cession avec une belle plus-value de 20 M€.

Par souci de simplicité, on va faire comme si toute la plus-value était imposée au taux marginal, sachant qu’en réalité on gratte des abattements supplémentaires liés à la progressivité de l’impôt sur le revenu.

Après abattement de 85%, il reste 15% sur lequel s’applique la tranche marginale de 45% de l’impôt sur le revenu, soit un taux effectif de 6,75 %.

En parallèle sur 100% de la plus-value, on a 17,2% de prélèvements sociaux et 4% de contribution exceptionnelle (là encore on ne prend que la tranche marginale par souci de simplification, mais en réalité cette contribution est progressive).

On se retrouve donc avec une imposition totale de 5,59M€, soit nos 27,95% ci-dessus. 

L’année suivante le cédant a la possibilité de déduire 6,8% soit 204.000 euros (6,8% x 15% x 20 M€) euros de ses revenus imposables. A supposer que notre contribuable-entrepreneur soit encore en tranche marginale d’impôt sur le revenu (ce qui est souvent le cas notamment si on reste travailler pour l’acquéreur et qu’on a eu la présence d’esprit de négocier un bon salaire, voire un bon earn-out), il économise donc : 45% d’impôts soit 91.800 €.

Cela ramène donc son imposition totale à 5,498 M€, soit un taux réel de 27,49% (légèrement surévalué dû à la progressivité mentionnée ci-dessus). Ce recours permet donc de bénéficier d’un régime plus favorable que la nouvelle Flat Tax qui aurait coûté dans notre exemple 6,775 M€.

A noter enfin que l’option pour l’imposition de la plus-value au barème progressif de l’impôt sur le revenu (avec le bénéfice de l’abattement pour durée de détention) est globale pour une année d’imposition et concerne tous les revenus financiers et toutes les plus-values financières et dividendes de l’année d’imposition.

Il est fréquent qu’une société ne soit pas créée par un seul fondateur mais plusieurs. Dès lors qu’au moment de la constitution ou d’une acquisition de titres un fondateur détient moins de 25% du capital, il peut inscrire ses titres au sein d’un Plan d’Epargne en Actions.

iii. Le Plan d’Epargne en Actions

Le PEA, est une enveloppe bancaire réglementée qui permet de loger des titres de sociétés qui ont leur siège social dans l’Union européenne ou dans l’Espace économique européen et qui sont soumises à l’impôt sur les sociétés. Il est possible d’y inscrire des titres non cotés sous réserve que le fondateur et son groupe familial (conjoint, le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou leurs ascendants ou descendants) ne détiennent pas plus de 25% du capital.

En revanche, il n’est plus possible d’inscrire des actions de préférence et des Bons de souscription d’actions dans cette enveloppe.


En résumé, si lors de la création de votre société vous détenez moins de 25% du capital, vous pouvez loger (par souscription ou acquisition, et uniquement à l’aide des liquidités du compte espèce du PEA) vos titres au sein d’un PEA et cela en grande partie pour son régime fiscal spécifique.


L’avantage du PEA est que toutes les plus-values réalisées en son sein sont exonérées d’impôt sur le revenu. Tant que ces plus-values ne sont pas retirées du plan aucun impôt n’est dû. En cas de retrait du plan au-delà de la 5ème année de détention, les revenus sont définitivement exonérés mais restent soumis aux prélèvements sociaux (17.2% actuellement).


Pour le décompte de la durée du plan, c’est la date du 1er versement qui est prise en compte, ce qui milite pour une ouverture précoce y compris sans projet de création d’entreprise.
Les dividendes perçus au sein du plan bénéficient également d’une exonération mais plafonnée s’agissant des titres non cotés.


Il existe en réalité deux types de PEA, le PEA classique et le PEA PME. Les versements possibles sur ce PEA « classique » sont plafonnés à 150.000 €. Toutefois, il n’existe pas de plafond quant à la prise de valeur du plan.
A côté du PEA Classique, il est possible depuis 2014 d’ouvrir en complément un PEA-PME. Le plafond de versement initialement fixé à 75.000 € a été porté à 225.000 € à condition que le cumul des versements sur le PEA-PME et le PEA « classique » n’excède pas ce seuil. Ainsi, si votre PEA classique est au plafond, il resterait un solde de 75.000 € à investir sur le PEA-PME.


Notons que depuis une récente décision de Jurisprudence, il est possible d’acquérir des titres issus de l’exercice de BSPCE à travers son PEA. Pour l’heure les contours de cette nouvelle opportunité restent encore incertains.

2. LE RÉGIME FISCAL DES HOLDINGS

Si la fiscalité personnelle s’est grandement améliorée, à première vue le régime fiscal de la holding paraît encore plus performant.

Dans le cas de figure le plus favorable, lorsqu’on réalise une plus-value, on peut bénéficier d’un taux d’impôt incroyable de 3% avec un IS 2024 à 25% digne d’un des meilleurs paradis fiscaux de la planète.

Alors pourquoi hésiter ?

Parce que bien sûr, ce taux exceptionnel vient avec un certain nombre de contraintes, et si on se prend les pieds dans le tapis fiscal, il peut grimper très vite à des niveaux qui peuvent faire regretter le montage.

Tout d’abord, il faut bien comprendre qu’il y a une différence notoire entre avoir de l’argent sur son compte personnel et de l’argent logé dans une holding. Dans le premier cas, on peut l’utiliser comme cela nous chante, tandis que dans le second cas, il faut veiller à ce que l’utilisation soit conforme à l’objet social de la holding. Sinon on risque tout simplement l’abus de bien social.

Bien sûr, il est toujours possible de sortir de l’argent de sa holding sous forme de dividendes. Comme nous l’avons vu, la taxation est désormais fixée à 30% (ou 34% avec la CEHR). 

Il est aussi possible de sortir de l’argent de sa holding au moyen d’un rachat par celle-ci de ses propres titres suivi de leur annulation. Le gain lié à cette opération suit le même régime que les plus-values de cession de titres : 30% toujours. 

Certains voient aussi la holding comme une sorte de sas de décompression permettant de stocker le prix de cession et d’étaler la fiscalité dans le temps sous forme de dividendes annuels. Même si c’est fiscalement moins optimal, cela peut être psychologiquement rassurant de payer ses impôts au fil des vrais besoins de son train de vie, plutôt que tout d’un coup au moment de la vente.

La CEHR étant appliquée au-delà des montants annuels mentionnés plus hauts, l’étalement dans le temps de ces distributions peut permettre d’y échapper quasiment totalement. En espérant que les échéances électorales à venir n’entraînent pas un changement brutal de fiscalité …

Bref on l’a compris, si on se lance dans une holding, pour optimiser sa fiscalité il faut éviter de sortir trop d’argent de cette tirelire dorée. Dans la pratique, on est souvent condamné à une sorte d’épargne forcée sur sa holding. Pas étonnant que les banquiers adorent les holdings patrimoniales où ils ont tout loisir de déployer leur expertise en placements. Qui veut devenir le plus riche du cimetière ?!

Comme on l’a découvert au Galion, la plupart des entrepreneurs ne vivent pas seulement d’amour et d’eau fraîche, surtout après la vente de leur start-up. La solution pragmatique consiste à garder une partie de ses titres en direct afin de couvrir son futur train de vie, le reste des titres étant logé dans une holding personnelle qui aura vocation à servir de véhicule d’investissement futur.

3. LA RÉPARTITION EN DIRECT VERSUS HOLDING

Vient immédiatement la question : comment répartir ses titres entre la poche qu’il convient de détenir en nom propre et celle qu’on va loger dans sa holding ?

Ce n’est pas si simple.

Tout d’abord, il faut se poser la question de combien on aura besoin pour couvrir son futur train de vie. Selon qu’on soit de nature frugale ou somptuaire, on peut arriver à un chiffre assez différent.

Mais surtout, cela dépend beaucoup de combien on va toucher sur la vente de sa start-up. Si la plus-value est de 2M€, on peut vite en arriver à consacrer l’essentiel de ses gains à sa vie personnelle. Si par contre, on touche 30M€, on peut facilement se dire qu’on va consacrer les deux tiers, voire plus, à des investissements futurs.

Le tableau suivant permet d’illustrer le train de vie qui peut être attendu des liquidités investies suite au cash-out :

Tableau détenir ses actions en startup

Ainsi un fondateur qui va réaliser un exit de 30 M€ mais dont le besoin est de 130 K€ par an n’a besoin en réalité que de céder 5 M€ en direct…

On en vient à la question fondamentale du timing de création de cette fameuse holding.

i. Cas de la holding créée juste avant la vente de la start-up

Comme le montant du chèque de sortie est une variable clé, le premier réflexe est de se dire qu’on va créer cette holding juste avant de vendre sa start-up. Comme ça, on aura une idée très claire du montant à mettre dans chaque poche.

A ce stade, il convient de rentrer dans la mécanique de création de la holding. Concrètement, l’entrepreneur va créer une nouvelle société NewCoPerso dont il est l’actionnaire unique et va apporter à cette NewCoPerso tout ou partie des titres qu’il détient en direct dans sa start-up.

La beauté de l’opération est que, s’il a bien pris soin que sa NewCoPerso soit au régime de l’impôt sur les sociétés (IS), l’entrepreneur bénéficie d’un report d’imposition sur la plus-value constatée lors de l’apport.

Cela veut dire que même si techniquement l’apport est assimilé à une « vente » de ses titres à sa holding, il n’est pas tenu de payer immédiatement d’impôt sur la plus-value. A noter que cette disposition ne va pas de soi et que ce report d’imposition constitue une des nombreuses douceurs du système fiscal français (tant décrié). Par exemple, ce type de report n’existe pas aux Etats-Unis où l’apport de ses titres à une holding est un évènement taxable immédiatement (on y reviendra).

Comme la holding NewCoPerso a été créée juste avant la vente, elle va elle-même céder les titres de la start-up à une valeur identique à la valeur d’apport, donc aucune plus-value n’est extériorisée par la holding. Wow, miracle, on est pour l’instant à 0% d’imposition tant à titre personnel qu’au niveau de la holding !

Néanmoins, au moment de la vente des titres de la start-up par la holding, cela est censé faire tomber le report d’imposition et l’entrepreneur devrait donc payer sa fiscalité personnelle. Dans ce cas, on ne voit pas trop l’intérêt du montage, puisqu’au final, l’entrepreneur aura payé ses impôts comme s’il détenait ses titres en direct tout en ayant les contraintes de l’argent coincé dans sa holding.

En fait, il existe une disposition intéressante qui permet de prolonger le report d’imposition. Pour cela, la holding doit s’engager à réinvestir au moins 60% du produit de cession dans une activité économique et ceci dans les deux ans qui suivent la cession. De plus, ces « réinvestissements » doivent être conservés pendant au moins 1 an, voire 5 ans s’ils sont effectués via des fonds d’investissements (Galion.exe ?)

La beauté du montage est que la prolongation du report n’a pas de limite de durée. Une fois les conditions ci-dessus respectées, le seul événement qui provoquera la déchéance du report est la cession totale ou partielle de la holding. Par cette disposition étonnante, le législateur a bien sûr voulu (pour une fois) favoriser l’investissement productif et non les rentiers. Qui a dit que la France n’était pas un paradis fiscal pour les entrepreneurs ?!

Pour être bien clair, on ne parle pas ici d’acheter de l’immobilier ou de se constituer un portefeuille en bourse. Il faut soit créer une nouvelle start-up, soit souscrire à une augmentation de capital d’une start-up existante ou toute société commerciale existante, soit racheter une participation majoritaire dans une société.

En revanche sur le solde des liquidités de la holding après le réinvestissement d’au moins 60% du produit de la cession, on a toute latitude d’investissement en termes de produits financiers ou immobiliers.

Deux ans pour réinvestir, cela paraît long, mais en fait c’est très court. Par exemple, si on a logé 20M€ dans sa holding, il faut réinvestir au moins 12M€ dans les deux ans, sinon le report d’imposition tombe sur l’ensemble de la plus-value. Investir 12M€ en deux ans dans des start-ups, ce n’est pas si simple. C’est un vrai métier qui ne s’improvise pas et prend du temps. C’est d’autant plus compliqué si l’entrepreneur a une clause de lock-up qui l’oblige à continuer à travailler à plein temps pendant toute cette période dans son ancienne start-up, ce qui est très fréquent. Le risque est que l’obsession de garder le report d’imposition pousse à prendre des risques déraisonnables et au final à perdre plus d’argent que la carotte fiscale initiale. 

Bref, avant de transférer massivement ses titres dans une holding la veille de la vente de sa start-up, mieux vaut avoir déjà une idée très claire de ce qu’on veut faire dans les deux ans à venir.

Pour les cédants qui n’ont ni les réseaux, ni le temps de se consacrer à la recherche de cibles, depuis 2019, les réinvestissements éligibles ont été élargis à certaines structures de capital investissement (fonds commun de placement à risques (FCPR), fonds professionnels de capital investissement (FCPI), sociétés de capital-risque (SCR), sociétés de libre partenariat (SLP), ou organismes similaires établies dans un autre Etat membre de l’UE ou de l’EEE) à condition que :

– La société contrôlée par le contribuable conserve les parts ou actions des fonds souscrites pendant 5 ans à compter de la date de la souscription

– L’actif de ces fonds soit constitué à hauteur de 75% au moins de titres de capital de sociétés opérationnelles européennes, et dont 50% au moins devra être constitué de titres de société non cotées ou cotées sur un marché réservé aux PME (souscription au capital ou acquisition conférant le contrôle) à l’expiration du délai de 5 ans.

Depuis le 1er janvier 2024, les contraintes d’investissements ont été allégées pour les sociétés gérants ces fonds. En particulier les obligations sont éligibles dans une certaine limite, et les cessions par le fonds peuvent être envisagées dans un délai de 2 ans précédant le terme de 5 ans pour l’appréciation du respect du quota.

ii. Cas de la holding créée au démarrage de la start-up

Pour éviter une cavalcade frénétique sur les réinvestissements suivant la vente de sa start-up, il existe une autre tactique. Cela consiste à loger ses titres dans sa holding personnelle NewCoPerso dès la création de sa start-up.

Dans notre arsenal fiscal qui décidément révèle bien des surprises, il existe en effet une disposition intéressante qui stipule que si la holding NewCoPerso a détenu les titres pendant au moins 3 ans, on est dispensé de la contrainte temporelle sur le réinvestissement. En créant d’abord la holding puis la société opérationnelle (filiale de la holding), on s’affranchit de toute obligation de conserver les titres pendant une durée minimale puisque techniquement on ne sollicite le bénéfice d’aucun report d’imposition (il n’y a pas d’apport de titres).

Évidemment, au moment du démarrage, le fondateur n’a aucune idée du montant qu’il va toucher à la sortie, donc la répartition entre la poche personnelle et la poche à réinvestir sera un peu arbitraire. Rien n’est parfait, mais ce n’est pas tout.

Avec la holding NewCoPerso qui a acquis les titres de la start-up au nominal au démarrage, elle fera bien sûr la plus-value complète au moment de la vente de la start-up. C’est là que le taux de 3% mentionné plus haut prend toute son importance.

Comme toutes les sociétés, NewCoPerso est taxée à l’impôt sur les sociétés (IS) à un taux maximum de 25%. Mais cette taxation ne s’applique que sur une assiette de 12% des plus-values de cession, qui est censée correspondre à une quote-part de frais et charges (tout à fait fictive entre nous dans le cas d’une holding personnelle, mais le principe est accepté par l’administration fiscale qui en la matière est étonnamment accommodante). D’où le taux marginal d’imposition effectif qui descend à cet étonnant 3%.

Néanmoins, pour bénéficier de ce délicieux statut fiscal de holding, il y a une contrainte importante : il faut que NewCoPerso détienne au moins 5% de la start-up au moment de la vente et ce depuis au moins 2 ans. Lorsqu’on crée sa start-up, cela paraît un niveau assez faible, mais avec les tours de financement successifs, il est courant pour certains fondateurs de descendre sous ce seuil fatidique. A fortiori si l’entrepreneur a décidé de ne mettre qu’une partie de ses titres dans sa NewCoPerso. 

On imagine très bien la situation où l’entrepreneur va se trouver devant le choix cornélien de soit refuser un tour de financement indispensable pour la croissance de sa start-up, soit accepter de passer sous le seuil des 5%, ce qui le conduira à une taxation à 25% sur l’ensemble des titres de sa start up détenus par sa holding. De belles nuits blanches en perspective.

iii. Cas de la holding créée en cours de vie de la start-up

C’est là que les malins se disent : ” pourquoi ne pas créer la holding en cours de vie de la start-up, une fois celle-ci a atteint un certain stade de maturité ? Avec un peu de chance, on va pouvoir optimiser les choses au mieux. “

Cela permet en effet d’avoir une bien meilleure visibilité qu’au démarrage à la fois sur la trajectoire de la start-up.

Pour décider du nombre de titres à mettre dans sa holding, il faut se poser la question : dans un scénario réaliste, est-ce que mon espérance de gain se situe plutôt en millions ou en dizaines de millions et à quelle échéance cette sortie peut s’envisager ?

Pour estimer le risque que cette NewCoPerso tombe sous le seuil de 5%, il faut se demander : combien faut-il pour atteindre le break-even et à quelle valorisation je peux espérer obtenir cet argent ?

A ce stade, il reste une inconnue de taille qui peut avoir un impact important sur le niveau de taxation : à quelle date se fera la cession ? C’est une question à laquelle il est souvent difficile de répondre en cours de vie de la société, car même s’il n’y a rien à l’horizon, un acheteur peut survenir à tout moment et vouloir conclure une vente en quelques semaines. Dans ces cas, il faut savoir saisir sa chance, car les plats ne repassent pas toujours deux fois.

Pourquoi le timing de la vente est-il si important ?

C’est qu’en fait, comme évoqué plus haut, pour bénéficier encore une fois du statut fiscal privilégié de la holding concernant les plus-values, il faut que la holding ait détenu les titres depuis au moins 2 ans. Sinon la plus-value de la holding sera taxée au taux plein à 25%. Cette taxation s’apprécie bien sûr uniquement sur la plus-value de la holding, donc par rapport au prix d’apport des titres à la holding (qui en cours de vie de la start-up va en général se caler sur celui du dernier tour de financement avec un léger discount si celui-ci était en actions de préférence).

On voit que le cas de figure le plus défavorable est celui d’une vente dans les 2 ans qui suivent le montage, si pendant cette durée la start-up s’est fortement valorisée (ce qui en principe est un scénario que tout le monde souhaite). Le fondateur se retrouve à payer l’IS plein à 25% sur la plus-value de la holding. Comme il est aussi dans la fenêtre de 3 ans, il est aussi contraint de réinvestir 60% du prix de cession pour bénéficier du report d’imposition sur sa fiscalité personnelle.

4. POUR ALLER PLUS LOIN SUR LES HOLDINGS PATRIMONIALES :

Quelques éléments supplémentaires à avoir en tête avant de se lancer dans une holding patrimoniale.

– Si on a pour projet à titre personnel de partir s’installer aux Etats-Unis (pour beaucoup de start-up Galion, c’est un enjeu stratégique majeur), il faut complètement oublier les holdings. En effet, non seulement les carottes fiscales décrites ci-dessus n’ont pas d’équivalent aux US, mais les Etats-Unis appliquent une transparence fiscale totale sur les holding personnelles. De fait, cela revient à subir une double taxation (le 3% vient en supplément de la fiscalité personnelle), ce qui n’est vraiment pas l’idée recherchée !

– La mise en place d’une holding complique légèrement le pacte d’actionnaire avec les investisseurs, sans que cela soit du tout rédhibitoire. Ils voudront simplement s’assurer que cela ne distorde pas l’esprit du pacte, ni que ce soit un moyen de contournement de certaines clauses. Pour que cela se passe bien, il convient de ne pas être trop créatif et de garder une structure personnelle à vocation purement fiscale. A éviter : faire entrer sa famille ou ses amis dans sa holding personnelle ou utiliser cette holding pour faire d’autres montages.

– Les holdings exotiques dans les paradis fiscaux sont une complication supplémentaire pour un intérêt assez limité. Tant qu’on est résident fiscal français, cela n’a aucun impact sur sa propre taxation personnelle, et le régime français est tellement favorable qu’il est difficile de trouver vraiment mieux ailleurs. L’intérêt se situe essentiellement en aval de la vente, afin de bénéficier d’une fiscalité réduite sur les futures plus-values de placements financiers. Mais cela oblige à avoir une vraie substance dans ces montages. En clair, cela nécessite de se rendre régulièrement sur place. Dans un monde où les rendements financiers sont de toute façon bas, a-t-on vraiment envie d’aller plusieurs fois par an au Luxembourg (sous la pluie) pour économiser au mieux quelques milliers d’euros ? La vie est courte et mieux vaut faire du kite avec le Galion.

– Jamais un acheteur d’une start-up ne va racheter votre holding personnelle. Ce n’est pas son intérêt.

– Enfin la mise en place d’une holding entraîne un certain nombre de frais administratifs. A l’échelle des enjeux fiscaux sur une belle sortie, cela ne pèse pas grand-chose. Par contre, si l’aventure se révèle un désastre (ça arrive), ces frais deviennent tout de suite moins sympas pour les finances personnelles.

Par :
  • Jb RUDELLE

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